REQUISITION EN
1793
Extrait des registres du comité de
salut public de la convention nationale du 13 floréal, l'an
2 de la république.
Rapporté par Albert Boniface
François SALLENGROS, député du
Nord.
"Citoyens, dans le courant du mois d'août
dernier, le citoyen Vigier, commissaire à l'armement du
Nord, requit plusieurs ouvriers de la manufacture d'armes de
Maubeuge de se rendre à Arras avec leurs familles, et d'y
transporter leurs outils et ateliers, pour y mettre en état
de service les armes qui étaient susceptibles de
réparations.
Gilles Vaast CERISIER fut compris dans la
réquisition et s'empressa d'obéir. Rendu à
Arras avec sa femme (1) et ses enfants, il organisa un atelier de
garnisseur, et y travailla, ainsi que sa femme, comme chef
d'atelier, jusqu'au 29 frimaire. Il succomba alors à ses
pénibles travaux, et y mourut dans le plein exercice de ses
fonctions, après plus de trente ans de service dans la
manufacture de Maubeuge.
Il laisse six enfants en bas âge (2),
puisque l'aîné n'a pas atteint l'âge de quinze
ans, et sa veuve reste absolument privée de toute
ressource. Elle possedait une maison située à
Rousies, près Maubeuge. Pendant le blocus de cette place,
les Autrichiens l'incendièrent avec les bâtiments en
dépendant. Cette femme courageuse a continué,
après la mort de son mari, de travailler à la
garniture des canons; aujourd'hui cette ressource lui manque, les
canons ne se trouvant plus en quantité suffisante dans les
ateliers de cette commune pour entretenir tous les ouvriers. Se
voyant congédiée, elle a demandé qu'on lui
fournit une voiture pour transporter sa boutique à Paris,
où elle espérait travailler utilement pour le
service de la patrie, et on n'a pu lui accorder.
Ces faits sont attestés par
différents certificats joints à la pétition
de la citoyenne veuve CERISIER; mais il a paru à votre
comité des secours, auquel vous avez renvoyé la
pétition, que vous ne laissariez pas dans la
détresse et dans la plus affreuse misère une veuve
et six enfants dont le mari et le père a si bien
mérité de la patrie qu'il n'a cessé de servir
pendant toute sa vie.
En conséquense, je suis chargé de
vous proposer le projet de décret suivant:
"la convention nationale, après avoir
entendu le rapport se son comité des secours publics,
décréte:
Art. 1er. Les commissaires de la
trésorerie nationale tiendront à la disposition du
conseil général de la commune de d'Arras une somme
de 300 livres, pour être remise, le plus promptement
possible, à la citoyenne veuve de Gille-Vaast CERISIER,
vivant chef de l'atelier de garnisseurs de canons de fusils, dit
du Collège, établi dans cette commune.
Art. 2e. La convention nationale renvoie
à son comité de salut public la pétition de
la citoyenne veuve CERISIER, avec les pièces y jointes,
pour mettre en réquisition, s'il le croit avantageux
à la chose publique, cette veuve courageuse et ses enfants,
avec les outils et atelier qui lui appartiennent, ou pour prendre,
à l'égard de ladite veuve et de ses six enfants, tel
autre parti qu'il croira convenir et que mérite leur
position malheureuse et digne de la justice et de la
reconnaissance nationales. "
Ce décret est adopté.
CERISIER Gille Vaast est né le
03/06/1752 à Rousies, fils de Pierre et de Marie Catherine
Godissart. Le 27 novembre 1775, à Mairieux, il
épouse en premières noces DUBOIS Marie
Françoise Joseph, qui décéde le 19/05/1785
à Rousies. Il décéde le 18/12/1793 à
Arras (3).
(1) Il se remarie avec Catherine BOISTELLE le
14/02/1786 à Maubeuge.
(2) Enfants du premier lit: Marie Aldegonde
(°11/09/1776 ), Pierre (°15/03/1779; +21/07/1780), Jean
Pierre (°15/08/1781), et Marie Joseph Désirée
-27/05/1784)
Enfants du second lit: Isidore
(°28/03/1787), Jean Baptiste Joseph René
(°19/07/1789) et Alexandre (21/07/1791). Un enfant est
peut-être né à Arras.
(3) Le 19.12.1793 en vieux style, 20e jour
de frimaire de l'an 2 de la république une et indivisible,
9h du matin, aupardevant moi Augustin Xavier ROUVROY élu
pour constater les décès des citoyens de la commune
d'Arras, département du Pas de Calais, sont comparus
Antoine DEBIS 53 ans armurier et Bernard MAITREPIERRE armurier 21
ans tous deux domiciliés à Arras lesquels ont
déclaré que Gilles Vaast Joseph CHERISIEZ armurier
quarante deux ans, natif de Maubeuge époux de Catherine
Joseph BOISTEL est mort le jour d'hier à 9h1/2 du soir en
son domicile du collège d'Arras. D'après cette
déclaration je me suis transporté à son
domicile et me suis assuré du décès du dit
CHERISIER. Signés Rouvroi, Debis, Maitre
Pierre.
LES PENSIONNES
Les ouvriers des manufactures d'armes
étaient considérés comme militaires. A ce
titre ils reçoivaient une pension.
Vous trouverez ci-dessous la liste des maitres
ouvriers et ouvriers admis à la retraite avec pension, au
01/01/1826, et deux en 1832.
Certains toucheront un arrièrage d'un
an. Ceux qui travaillent encore ne pourront toucher la pension
qu'après la cessation définitive de
travail.
Les onze premiers et les deux derniers
étaient maîtres ouvriers.